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Nicolas BACRI

photo Nicolas BACRI

Première période

Né à Paris le 23 novembre 1961 dans une famille musicienne, Nicolas Bacri a abordé la musique par l'étude du piano à l'âge de huit ans. Ses premiers professeurs d'analyse et d'écriture, Françoise Gangloff-Levéchin et Christian Manen, assisteront ses premiers pas dans le domaine de la composition qui le mèneront dès l'âge de seize ans à l'écriture de morceaux symphoniques interprétés en octobre 1978, par l'orchestre du Théâtre National de Prague sous la direction de son père, pour une collection de disques (non commerciaux) consacrée à l'illustration sonore pour le cinéma, la radio ou la télévision. À partir de ce moment, la vocation de Nicolas Bacri est claire, il sera compositeur. Sur les conseils de Marius Constant qui trouve les "essais pragois" encourageants, Nicolas Bacri se présente à Serge Nigg, alors professeur de composition au CNSM de Paris. C'est avec lui et Louis Saguer (1907-1991) qu'il prépare le Concours d'entrée au CNSM tout en suivant les cours de la classe de composition comme auditeur libre à partir du printemps 1979.
À l'automne 1980 il est admis au CNSM de Paris en classe de composition (où il est également élève de Michel Philippot en alternance avec Serge Nigg), analyse avec Claude Ballif et orchestration avec Marius Constant, et termine ce qu'il considère comme sa première œuvre aboutie, le Quatuor à cordes opus 1.
Aussitôt son Quatuor exécuté il prend contact avec Elliott Carter — à qui il dédiera sa Symphonie n°1 op. 11 (1983-84) — qui écrira en 1989 : "En effet, la musique de Nicolas Bacri, vaut certainement la peine d'être étudiée, car l'imagination et la maîtrise musicales que vous y trouverez montrent que ses partitions sont parmi les plus importantes de sa génération française".
Trois ans plus tard, au printemps 1983, il obtient un premier prix de composition à l'unanimité avec félicitations du jury et est nommé pensionnaire de l'Académie de France à Rome (Villa Médicis) pour deux ans.
À peine âgé de 22 ans son catalogue comporte déjà dix numéros pour des formations très variées dont les plus importants sont deux Quatuors à cordes (op. 1, 1980 et op. 5, 1982 ; commande du Ministère de la Culture), un Concerto pour piano (op. 2, 1981), resté inédit, et un Concerto pour violon et vingt-et-un instruments (op. 7, 1982-83) créé en 1985 lors du Festival "Carte blanche à Harry Halbreich" de la série "Perspectives du XXème Siècle" à Radio-France, sa première œuvre à attirer une large attention du public et de la critique, suscitant notamment l'enthousiasme de Dino Villatico dans les colonnes de la Repubblica, dans un article intitulé "La nouvelle musique vient de France" lors de sa deuxième exécution, à Rome, quelques mois plus tard.
La Villa Médicis est pour lui, de 1983 à 1985, le lieu d'un intense travail de composition et de réflexion. Il y écrira principalement sa Symphonie n°1 op. 11 (1983-84), 4 Nocturnes op. 15 pour hautbois et violon (1985), la première version d'Esquisses pour un Tombeau (3ème Quatuor à cordes op. 18 ; 1985/88), commencera Notturni op. 14, pour sept instrumentistes et soprano (1985-86) et le Concerto pour violoncelle op. 17 (1985/87) (dédié à Henri Dutilleux). En outre, il rencontrera Giacinto Scelsi (1905-1989) dont la personnalité hors du commun le marque suffisamment pour lui faire prendre conscience que l'heure d'un premier bilan esthétique est venue.
De retour à Paris à l'automne 1985 il obtient une commande du Ministère de la Culture pour Notturni (Concerto da camera quasi una sinfonia piccola, pour sept instrumentistes et soprano), une commande de Radio-France pour Capriccio Notturno op. 20 (Concerto pour clarinette, 1986-87) et le Prix Stéphane Chapelier de la S.A.C.E.M.

Deuxième période


De 1987 à 1991 il est délégué artistique du service de musique de chambre de Radio-France et membre de la Commission symphonique de la SACEM (1989-91). Il obtient le Prix André Caplet de l'Académie des Beaux-Arts (1989) et une commande du "Festival de Flaine" pour sa Symphonie n°2 op. 22 (Sinfonia dolorosa, 1986/90).
De 1991 à 1993 il est pensionnaire de la Casa de Velázquez (Madrid) et réside à Valencia où il se consacre essentiellement à la composition de sa monumentale Sinfonia da Requiem (Symphonie n°3 op. 33, pour chant, chœurs et grand orchestre), dédiée à la Gloire d'Abraham, commencée en 1988, commandée en partie par musique nouvelle en liberté et Radio-France, et achevée à son retour en France en 1994 grâce au soutien de la "Fondation d'entreprise du Crédit National" (Natexis Banque populaire). En Espagne il compose aussi son Sextuor à cordes op. 36 (à la mémoire de son maître Louis Saguer), commande du Sextuor de l'A.I.E.C. (1991-92), son Divertimento op. 37 pour clarinette et trio à cordes (1991-92), commande de la Ville de Saint-Nazaire pour le Festival Consonances, et son Concerto pour trompette op. 39 (1992 ; dédié à Sir Michael Tippett), commande du "Concours international d'instruments à vent de Toulon 1993". Pendant cette période, il obtient les prix Pineau-Chaillou de la Ville de Nantes (1991) et Georges Wildenstein de l'Académie des Beaux-Arts (1993).
De 1993 à 1998 il réside à l'Abbaye de La Prée (Région Centre), invité par l'Association "Pour Que l'Esprit Vive". Lauréat de la "Fondation d'entreprise du Crédit National" (Natexis) (1994-96), il obtient différentes commandes : de l'A.D.D.M. de Loire Atlantique pour sa Sinfonietta pour instruments à vent, op. 38c ; de Radio-France en 1993 pour Vita et Mors, op. 33 n°3 (dernière partie de la Sinfonia da Requiem), et en 1994 pour sa Sonate pour violon et piano op. 40 ; de musique nouvelle en liberté pour In Modo Infinito op. 33 n°4 (également extrait de la Sinfonia da Requiem); de l'"Arsenal de Metz" et de l'ensemble Musique Oblique pour Im Volkston (pour clarinette, violon et violoncelle). Il reçoit le Prix Pierre Cardin de l'Académie des Beaux-Arts (1994), et le premier disque entièrement consacré à sa musique (Concerto pour violoncelle, 2°Concerto pour violon, Requiem et Folia pour alto et cordes) fait partie du palmarès des Grands Prix de la Nouvelle Académie du disque 1994.
En 1995 il est nommé "Compositeur en résidence" de l'Orchestre de Picardie (Amiens) pour lequel il écrit sa Symphonie n°4 op. 49 (Symphonie classique "Sturm und Drang"), et l'Orchestre Symphonique Français, qui le nomme "premier compositeur invité", lui commande sa Cantate n°4 op. 44 (sur le Sonnet 66 de W. Shakespeare). Les 5 Motets de souffrance et de consolation op. 59 (1998) sont une commande de Radio France et de la Chapelle Royale de Versailles. Sa Symphonie n°6 op 60 (dédiée à Serge Nigg) a été écrite en 1998 à la demande de Radio France pour son émission Alla Breve (France Musique) afin d'être enregistrée par l'Orchestre National de France dirigé par Leonard Slatkin. Puis viennent le Concerto da camera op 61, commande de la Société Van Doren pour le clarinetiste Philippe Cuper, le motet Nisi Dominus, commande de la Cité de la Musique, le Concerto pour flûte (1999), commande du Ministère de la Culture pour Philippe Bernold et l'Orchestre de Cannes, le Benedicat Israel Domino pour le Florilège Vocal de Tours 2001 et le Deuxième concerto pour trompette, commande de musique nouvelle en liberté pour le Concours Maurice André de la Ville de Paris (Pleyel, 7 octobre 2000)...

Conclusion

L'œuvre de Nicolas Bacri peut déjà se diviser en deux périodes et l'on ne peut dire si la deuxième sera la dernière ou si les métamorphoses de ce compositeur continueront de nous surprendre. Ce qui est constant, et réjouissant, c'est le motif de cette métamorphose. Il pourrait se définir dans le souci de Nicolas Bacri d'échapper à tout conformisme esthétique en vue d'atteindre la plus grande authenticité artistique possible.
Très tôt marquée par l'école de Vienne, de Darmstadt (première période, 1980-87) et particulièrement par la musique d'Elliott Carter (jusqu'en 1984), l'œuvre de Nicolas Bacri va progressivement se libérer de cette influence. Stimulée par l'exemple de ce mystique du son qu'est Giacinto Scelsi sa musique s'ouvrira pour une courte période (1984-87) sur un travail de la matière sonore pour aboutir, de façon inattendue, vers 1987 à "l'examen de possibilités de renouement avec la pensée symphonique tonale élargie" (dixit N.B.) post-Mahlérienne — certains compareront cette nouvelle démarche à celle de Chostakovitch ou de Britten. En effet, pour Nicolas Bacri "il est naturel qu'un artiste réexamine ce que les artistes dominants de la génération précédente tiennent pour acquis."
Les premières œuvres de N.B. sont atonales et, par conséquent, enracinées dans une problématique qui lui semble appartenir en propre aux compositeurs "de la génération précédente" qui l'ont influencé au début de sa carrière. Ce qui explique qu'il ne peut qu'employer l'expression "examen des possibilités de renouement" lorsqu'il en vient progressivement à considérer "le sentiment tonal" — une tonalité non fonctionnelle dans une musique cependant faite de "sons s'attirant ou se repoussant, de tensions et de détentes harmoniques et rythmiques" — comme "inéluctable au propos musical tel qu'il le conçoit aujourd'hui". Or, chez N. Bacri, aucune intention polémique ne sous-tend cette conversion esthétique. Il s'agit seulement pour le compositeur "d'expérimenter une nouvelle voie pour tenter de se rapprocher plus encore de son essence personnelle" et son respect pour certains des compositeurs nés au début du siècle dont l'évolution fut exactement inverse à la sienne reste intact. Pourtant il publiera Notes étrangères en 2004, ressenti par certains comme une critique à l'égard du modernisme, mais il s'agit surtout d'une critique de l'intitutionnalisation de l'avant-garde et de l'esprit d'orthodoxie qui en a découlé.
Ce cheminement vers le "sentiment tonal" qu'il croyait définitivement et historiquement disparu au début de sa vie de musicien et qu'il retrouvera inéluctablement en même temps que ses racines hébraïques, méditerranéennes mais aussi Mittle-Europa (son arrière grand-père venait d'Alsace et s'appelait Meyer), c'est ce dont sa musique nous parle d'œuvre en œuvre, suivant une courbe esthétique progressive et surprenante, mais toujours animée du même souffle lyrique, dense, et des mêmes couleurs sombres, violentes et tendues jusqu'à l'austérité, jusqu'au tragique.

Hélène Thiébault, 1995
Rev. : avril 2000/2004

couverture SONATE N°3 OP.156 Robert Martin
SONATE N°3 OP.156
Nicolas BACRI
Editeur : Robert Martin
Genre : Musique Instrumentale
Formation : Flûte
Style et options : Flûte et piano
(BACR06083) : 26,56