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Alexandre Piquion et Jérôme Genza

Nouveaux chefs de la Musique de la Police Nationale



L’Orchestre de la Police Nationale, basé à Vélizy, était sans chef après le départ de Jérôme Hilaire, qui dirigea la formation de mars 2009 à août 2015. Depuis le 1er septembre 2016, deux chefs recrutés par concours, ont pris leurs fonctions à la tête de la formation regroupant un orchestre d’harmonie de 80 musiciens et d’une batterie-fanfare d’une quarantaine de musiciens, actuellement dirigée par le tambour-major Christophe Lefèvre.

Dénommée Musique de la Sureté Nationale, elle est réorganisée dès 1956 et dirigée à l’époque par Maurice Huré. En 1968, elle prend l’appellation « Musique de la Police Nationale » sous la direction de Pierre Bigot qui la dirigea jusqu’en 1986. Jacques Desloges lui succéda jusqu’en 1992, puis Benoît Girault, Alain Decourcelles, Alexandre Jung et Jérôme Hilaire.

Le milieu professionnel s’inquiétant depuis plus d’une trentaine d’années de la fusion éventuelle des deux formations musicales de la police, celle de la préfecture de Paris et celle de la police nationale, peut être rassuré. Rappelons que Gildas Harnois dirige la Musique des Gardiens de la Paix depuis juillet 2014.

C’est donc une rentrée positive qu’ont connu les musiciens de la Musique de la Police Nationale avec la découverte de leurs nouveaux patrons, Alexandre Piquion, chef de musique et Jérôme Genza, chef adjoint.
Dans ce premier entretien croisé, nous souhaitons faire connaissance avec ceux qui apporteront une continuité à cette formation d’instrument à vent et percussion, fer de lance de l’Orchestre d’harmonie en France.

Questions à Alexandre Piquion

alexandre piquionPouvez-vous commentez et compléter pour nous ce parcours musical déjà très complet. Dans ce parcours, quelles rencontres ont été déterminantes ?
Commenter une trajectoire en cours n’est pas facile.
La rencontre de la voix et des chanteurs demeure un événement absolument déterminant de mon parcours.
Plus généralement, je dirais que je me suis laissé conduire par la nécessité un jour apparue de ne pas recouvrir mon désir d’aucune certitude, et de ne pas lui assigner une forme d’expression définitive. Et je compte bien tenir cette forme de discipline … . Le rétroviseur que vous me tendez fait donc peut-être apparaître une forme de continuité : la place depuis laquelle je pratiquais le violoncelle n’est pas différente de la place depuis laquelle je dirige, ni de la place depuis laquelle j’enseigne. Il s’agit toujours de rester présent aux événements, de manipuler une matière souvent très ductile, la modeler, la transformer parfois en s’emparant des outils, méthodes, savoirs en circulation. Pour exemple, ce surprenant MBA de Management est arrivé après les sollicitations reçues pour diriger des structures permanentes. L’étude de ces dossiers et de leurs enjeux m’a donné envie de formaliser et d’approfondir un peu. D’où ce diplôme imprévu. Mon itinéraire artistique est gouverné par le même mouvement. Celui de l’approfondissement permanent que suscitent, parfois demandent, les contextes eux-mêmes. C’est ainsi qu’en 2008, alors que je commençais à diriger pour quelques festivals lyriques, un premier engagement inattendu de chef de chœur au Théâtre du Châtelet a donné lieu à une fidélité de 7 ans, prolongée ensuite par le TCE qui m’a demandé de refonder son chœur. Mon parcours symphonique et lyrique était déjà marqué par cette même empreinte, de fidélités en découvertes, les unes les autres naissant des réalités de terrain éprouvées.
L’enseignement vient inscrire dans cette trajectoire : mon parcours lyrique m’a conduit à enseigner auprès des étudiants chanteurs du CNSMDP. Ce cours s’est peu à peu transformé en atelier d’opéra réunissant chanteurs, chefs de chant et chefs d’orchestre. Ce travail avec les étudiants chefs s’est prolongé par ma nomination à leurs côtés en tant qu’assistant d’Alain Altinoglu.
Mon intérêt pour la Musique de la Police Nationale n’y échappe pas : je connaissais la réputation de cette formation et le très haut niveau de musiciens la composant. J’ai postulé avec beaucoup d’enthousiasme.
Ce parcours a probablement été infléchi au cours de premières expériences fondatrices, violoncelle en main, auprès de l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg, l’Opéra du Rhin, plus tard l’Orchestre de Paris. Deux formations qui m’ont formé… 15 années de vie d’orchestre, de grandes personnalités (Gil Shaham, Pierre Boulez, Lorin Maazel, Yuri Temirkanov, Pierre-Laurent Aymard par exemple) approchées au cours de ces années ont bien sûr été très marquantes. Mais c’est plus curieusement à l’opéra que j’ai approché les travaux qui m’ont le plus influencé récemment. La théâtralité dans la musique, c’est à dire le théâtre du matériau musical lui-même est une dimension de mon propre travail que j’ai toujours beaucoup nourrie. Ma courte expérience de compositeur l’avait renforcée. Elle s’est enrichie au contact des méthodes et conceptions de certains metteurs en scène. Stéphane Braunschweig, Olivier Py, Robert Carsen par exemple. Le travail du répertoire lyrique ou symphonique avec mes étudiants du CNSMDP, chefs et chanteurs, continue d’approfondir ce geste.

Comme violoncelliste, vous n’avez pas eu l’occasion de jouer au sein d’un orchestre d’harmonie. Quel regard portez-vous sur cette formation pour instruments à vent et son répertoire ? Qu’est ce qui vous a animé à vous présenter à ce poste de chef de musique ?
C’est une question à laquelle il m’a été donné de répondre à de nombreuses reprises à propos de la direction de chœur. On s’étonnait de voir un chef d’orchestre, historiquement violoncelliste, et non chanteur, apparaître fidèlement aux côtés de chœur des maisons d’opéras que j’évoquais. J’étais alors au tout début de cette aventure de direction et n’avais pas été formé à la direction de chœur, en effet. Je manipulais seulement les outils de la direction d’orchestre qui me semblaient adéquats, en inventant souvent certains sur le terrain même. Je dirigeai un ensemble de musiciens, aux contingences, besoins et demandes particulières. Ceux-ci chantaient comme d’autres jouaient du violon et d’autres encore du cor. On ne parle certes pas à un percussionniste comme on parle à un chanteur. On parle néanmoins à deux musiciens, chacun d’entre eux appelant des nécessités et désirs propres. La direction de chœur a ainsi accompagné mon parcours de chef d’orchestre pendant plusieurs années. Je crois que nous ne pouvons pas cloisonner nos savoirs pour en faire des lieux figés. Adapter les moyens, inventer des outils que chaque contexte appelle, recouvrent une dimension vivante de mon métier laquelle je tiens. En conséquence, et pour répondre précisément à votre question, la Musique de la Police Nationale est un orchestre français dans le paysage des orchestres français. Elle porte par ailleurs un savoir-faire de très haut niveau : celui, prestigieux depuis plus d’un siècle, de l’École Française des vents, et qu’il faudrait encore détailler.
Nous pourrions raisonner en terme d’identité. Je parlerais davantage de patrimoine. C’est une formation unique. Je suis très honoré d’avoir été choisi pour occuper cette position auprès d’eux.
Quant au répertoire, nous sommes sur un terrain passionnant : le répertoire d’orchestre d’harmonie prend sa source à la charnière des musique populaires et savantes et se développe sur ces deux ailes. La tradition du XIXème, le développement des harmonies lors de la révolution industrielle, nous emmènent vers un très large éventail de transcriptions, expression de l’incroyable vitalité de ce qui ne s’appelait pas encore médiation, ni même démocratisation. On ne parlait pas encore alors de « musique de répertoire ». Cette tradition perdure et prend aujourd’hui les visages de son temps (avec les musiques de films notamment). Nous devons continuer de l’honorer ainsi que les lieux qui le sollicitent. Il s’agit du cœur populaire historique de nos formations. Il est également le terreau de nombreuses pratiques amateur pour lesquelles la MPN est un étalon de qualité.
S’emparant de ce format nouveau, le XXème siècle a connu la création de très nombreuses œuvres originalement écrites pour orchestre d’harmonie ou batterie-fanfare. La MPN est dédicataire de nombreuses d’entre elles. C’est un sillon que nous devons approfondir pour faire valoir encore les potentialités de cette formation auprès des compositeurs, pour lesquels les qualités remarquables de la MPN sont un véritable appui. Je souhaite renforcer cette orientation en faveur des œuvres originales en l’ouvrant davantage encore à la musique de notre siècle.

Avec Jérôme Genza, chef adjoint, comment allez-vous repartir le travail de répétitions et de concert ? Avez-vous un répertoire de prédilection ?
Il est tôt pour affirmer que la répartition de nos rôles reposerait sur un système défini. Nous tenons à maintenir la meilleure réactivité possible. L’affinité de répertoire, la nature de l’événement, la généalogie des concerts ou programmes, comptent bien sûr parmi les paramètres qui président à cette répartition. Nous considérons pour le moment chaque situation dans son caractère unique.
Il est important à mes yeux que le chef de musique adjoint puisse nourrir avec les orchestres de la MPN une relation artistique suivie et singulière. Là encore, nous devons tirer le meilleur parti des richesses en présence. La nomination de Jérôme Genza en est l’une d’entre elles.

La musique de la Police Nationale, au grand complet, Harmonie et Batterie-Fanfare, participe au protocole cérémonial. Sans doute, une première expérience pour vous. Comment appréhender ces nouveaux instants ?
Une première en un sens. Rien ne ressemble à une cérémonie protocolaire. La logique d’une cérémonie, sa grammaire, la scansion musicale de ses temps, ne m’est toutefois pas étrangère. Mais il s’agit ici d’un nouveau matériel musical d’une part - sonneries et marches militaires - et d’une finalité inédite dans mon parcours d‘autre part. La MPN est une formation de représentation et de prestige et répond aussi sur le terrain protocolaire à sa vocation d’excellence. Chacun de ses musiciens est remarquablement impliqué dans cette mission, dont il sait qu’elle est fondatrice dans l’histoire de l’orchestre. L’expérience du Tambour Major Christophe Lefèvre est tout aussi précieuse. J’ai donc pu prendre appui sur une équipe, dont les archivistes sont partie intégrante, pour élaborer cette nouvelle forme de savoir et ce nouveau geste professionnel.

Votre premier concert est-il déjà programmé ?

Notre premier concert a eu lieu début octobre en l’Église de la Madeleine, en présence du Secrétaire d’État Jean-Vincent Placé. Nous y célébrions avec 1200 spectateurs l’amitié franco-coréenne à l’initiative de Échos de la Corée, structure œuvrant au rapprochement culturel de ces deux pays. Trois chanteurs lyriques y étaient associés à l‘orchestre pour un programme mêlant œuvres écrites pour orchestre d’harmonie et transcriptions d’airs d’opéra. Un clin d’œil du hasard peut-être à l’adresse de la partie lyrique de mon parcours. L’occasion aussi d’éprouver, dans le travail comme sur scène, l’exceptionnelle réactivité de l’orchestre. Le prochain concert sera dirigé début novembre à Rambouillet par Jérôme Genza. Je retrouverai l’orchestre d’harmonie à l’Onde fin novembre pour un programme Bernstein. Christophe Lefèvre clôturera cette même soirée avec la Batterie-Fanfare.

Questions à Jérôme Genza

jgCornettiste de formation, élève de Jean-Paul Leroy au CRD d’Orléans, c’est naturellement très tôt, en 1987 à 14 ans que vous intégrez son Brass Band, premier en date en France. Brass Band, devenu du Val de Loire dont vous prenez la direction en 1999. Spécialisé en Formation musicale, en écriture et en direction d’orchestre, lauréat du concours de professeur chargé de direction en 2005, vous dirigiez, il y a encore quelques temps, l’école de musique d’Ingré et l’Harmonie Municipale de cette ville. Très impliqué dans le mouvement des orchestres à l’école, vous avez une vision d’ensemble de la musique pour instruments à vent.
Diriger un ensemble de musiciens dans un cadre professionnel comme celui de la Musique de la Police Nationale, est-ce un nouveau challenge espéré ?

Ce concours de Chef Adjoint fut une superbe opportunité de travail musical et de projection dans les missions qui me sont aujourd'hui confiées. C'est avec beaucoup d'attention et de détermination que je me suis préparé à cela. Diriger la Musique de la Police Nationale est pour moi une grande fierté, mais également une responsabilité à la mesure du renom de cette formation.

Que représente pour vous l’orchestre d’harmonie ?

L'orchestre d'harmonie est pour moi un vecteur culturel de premier plan. Historiquement présent sur le territoire, formidable outil de culture vivante, il est de notre ressort que de le faire briller.
J'ai construis ma personnalité au sein de ces orchestres d'harmonie. Au travers des rencontres, des situations, des répertoires, des après-répétitions, des stages et sessions, des chefs, des solistes, des concours... La richesse de cet apprentissage est unique et propre à la vie de chaque orchestre, qu'il soit société musicale de village ou grand orchestre de renom. Cet aspect de ma vie musicale a été déterminant dans mon parcours et demeure précieux à mes yeux.

Peut-on encore parler de formation à la française avec la recherche d’une sonorité spécifique et des compositions ou arrangements imposants cornets, bugles, barytons, saxhorns, pupitres fournis de clarinettes…?
Tout est question de choix et de priorité musicale. Je suis un défenseur de cette particularité. Néanmoins elle ne peut vivre qu'avec un contenu, qui doit se renouveler, qui doit exister pour qu'existe ce son. Ce moelleux que certains compositeurs ont utilisé de manière brillante, s'est transformé en touche de couleur sonore isolée par l'utilisation anecdotique d'un instrument pour un passage. Je souhaite pouvoir défendre cela par la diffusion des œuvres phares de notre répertoire et pouvoir envisager ce son si particulier dans de nouvelles œuvres auprès de compositeurs de notre temps.
La mondialisation est en marche pour nos orchestres d'harmonie. L'uniformisation « pratique » d'une orchestration standard calquable à toutes les formations est devenue la norme. Certaines de ces grandes pièces ont été arrangées pour pouvoir être jouée dans la formation type « nomenclature américaine ». C'est dommage. Je pense qu'il est de notre devoir de promouvoir notre spécificité au travers de ces instruments, d'autant que les musiciens français et plus particulièrement ceux de la Police Nationale les jouent de très belle manière !

La musique de la Police Nationale, au grand complet, Harmonie et Batterie-Fanfare, participe au protocole cérémonial. Comment appréhender ces nouveaux instants. Sans doute, une première expérience pour vous ?

Tout à fait, aborder le protocole a été une découverte pour moi. Cet aspect si particulier de ce métier est un chapitre que j'apprends au quotidien. Christophe Lefèvre, notre tambour Major est un homme de bons conseils et très soucieux de conduire les cérémonies avec tenue et rigueur.

De plus en plus, les formations musicales du ministère de l’intérieur et ceux de la Préfecture de Police de Paris, participent à des opérations citoyennes de proximité. Comment cela se concrétise-t-il pour la musique de la Police Nationale ?

Être policier aujourd'hui induit de nombreuses responsabilités, puisque les musiciens de l'orchestre passent un double concours, celui de musicien puis celui de Gardien de la Paix, nous avons une double mission, culturelle et policière. C'est au travers de partenariats avec l'académie de Versailles que la MPN s'inscrit dans nos missions de proximité. Nous avons une convention annuelle avec les établissements scolaires de l'académie pour établir avec eux un programme de sensibilisation et de prévention. L'impact est très important auprès du jeune public. Au delà de l'uniforme, l'aspect musical et pédagogique de nos interventions contribue à sensibiliser le public scolaire aux notions de citoyenneté, de valeurs républicaines et de proximité.

Quels projets sont entrevus dans ce domaine et notamment le lien avec les projets d’Orchestres à l’école ?
Dans le cadre de ce partenariat avec l'académie de Versailles, nous rencontrerons des orchestres à l'école bien sûr. Notre vocation n'est pas d'être présent hebdomadairement auprès des enfants, nous ne devons pas nous substituer aux partenariats locaux, mais bien d'être un support ponctuel lié à un projet précis.
Nous travaillons actuellement sur un projet autour de la Marseillaise, 2016 étant une année anniversaire (décrétée par le Président de la République), une forte demande des écoles autour de notre hymne national s'est faite jour. Diverses actions sont en cours, des présentations instrumentales en petites formations, à la production de chants accompagnés ou de contes musicaux sont organisés tout au long de cette année scolaire.

Votre premier concert est-il déjà programmé ?
Oui je me produirais pour la première fois le 9 novembre prochain avec l'orchestre d'harmonie au centre culturel La Lanterne de Rambouillet dans le cadre d'un concert de charité au profit de l'association Louis Carlesimo. C'est avec beaucoup d'enthousiasme et d'impatience que nous préparons ce concert.

Merci

Merci à vous

Y.R.