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Première Méthode

du tout Petit Flûté



le petit fluté
Entretien avec Annick
Sarrien-Perrier
Directrice de la collection Le petit Flûté

annick sarrien perrierAnnick Sarrien-Perrier, les Éditions Robert Martin publient cet automne, votre méthode, La Première Méthode du tout Petit Flûté,  destinée à l’apprentissage de la flûte traversière aux enfants de 6 à 9 ans. On pourrait penser que c’est votre première publication, c’est pourtant la douzième de la collection le Petit Flûté que vous animez depuis une dizaine d’années aux Editions Robert Martin. Comment est née cette collection et quel en est le fil conducteur ?
Avant de créer cette collection, je participais régulièrement à des jurys d’examens de fin d’année organisés par la CMF dans des petites écoles de musique et je constatais chaque fois que les élèves devaient interpréter des pièces qui leur étaient imposées et qui comportaient toutes une partie d’accompagnement piano. Malheureusement, la plupart de ces petites structures étaient dépourvues de pianistes, et les élèves jouaient la ligne mélodique seule, sans accompagnement, et cela n’avait aucun sens musicalement. J’ai proposé aux Éditions Robert Martin de créer des recueils qui seraient proposés avec les accompagnements “piano” enregistrés. J’ai réussi à les convaincre de l’utilité d’un tel outil pédagogique et sincèrement, je pensais ne toucher que le public de ces petites structures.
Il s’est avéré en fait que ce premier recueil Le Petit Flûté a rencontré tout de suite un très beau succès et pas uniquement dans les petites écoles sans pianiste, mais également – et surtout- dans les conservatoires.
Le succès a été tel que, cette fois, c’est l’éditeur qui m’a proposé de faire un volume 2. Même accueil positif de la part des professeurs de flûte car celui-ci s’adressait à des élèves de deuxième cycle, donc était considéré comme une suite du Volume 1.
 
- Flûtiste, issue de la classe de virtuosité de Maxence Larrieu au Conservatoire de Genève et Professeur certifié au CRD de Bourg-en-Bresse, vous avez un engagement fort pour la pédagogie de la flûte traversière. Qu’apportent vos méthodes à l’environnement des classes de flûtes au répertoire déjà conséquent ?
Il est vrai que le répertoire est déjà très riche, mais plus particulièrement pour les niveaux élevés de 3ème cycle. Concernant les œuvres pouvant être jouées par des jeunes élèves, on peut dire qu’il y a encore de la place pour la création. Le répertoire pour les Premier et Deuxième cycles est conséquent, avec des pièces très intéressantes, mais les recueils Petit Flûté proposent une version enregistrée des compositions et surtout l’accompagnement piano seul.
 
- Comment conciliez-vous la combinaison pédagogique qui lie le développement de l’apprentissage technique de la flûte et l’entrée du jeune flûtiste dans l’interprétation artistique et esthétique ?
Lorsque nous décidons de lancer un nouveau projet, j’élabore un cahier des charges très précis pour les compositeurs. J’essaie de faire en sorte que chaque pièce comporte des éléments techniques enrichissants pour la progression tout en mettant en avant, et je suis très exigeante sur ce point, les possibilités pour les jeunes enfants de s’exprimer musicalement. Les thèmes choisis – le cirque, le voyage, les époques par exemple- se prêtent bien à ce compromis. Il est d’ailleurs très fréquent que les conservatoires et la CMF ou l’UFF proposent des œuvres extraites de mes recueils dans les examens de fins de cycles.
 
- Doit-on au comme beaucoup de méthode le propose scinder les deux aspects, d’une part le travail technique, gammes, arpèges…. d’autre part l’interprétation sensible de pièces de caractères esthétiques ?
Je pense qu’il est nécessaire de bien travailler la technique de l’instrument par le biais d’exercices strictement écrits pour cela. Mais c’est le rôle du professeur de bien organiser son cours afin que les élèves puissent à la fois progresser techniquement et s’exprimer musicalement avec un répertoire varié et attractif. Je pense en effet que l’un ne va pas sans l’autre, et les pièces à caractère esthétique doivent faire partie du programme de l’élève de façon constante.
 
- La collection du Petit Flûté propose à chaque recueil des compositions d’un répertoire très vaste. Vous regroupez et hiérarchisez pour les recueils du Petit Flûté de nombreuses pièces, du répertoire existant ou de compositeurs vivants. Comment s’effectuent vos choix ?
A part pour le premier recueil, toutes les pièces enregistrées et éditées dans les Petits Flûtés sont des créations; Les compositeurs sont sollicités et reçoivent le cahier des charges. Quand je m’adresse à des tout-petits niveaux, je sais quelles sont les notes à utiliser, les rythmes, les modes de jeu etc. ... et je ne déroge pas. Un exemple : quand nous avons lancé l’idée de faire un Tout Petit Flûté, nous nous adressions à des débutants dans leur première année d’apprentissage. Ils ne connaissent que quelques notes et déjà peuvent se produire en audition car j’ai fait écrire des pièces spécifiquement pour eux. Donc, les compositeurs doivent non seulement respecter le cahier des charges en termes de notes, rythmes etc. .. mais également écrire un accompagnement simple à écouter pour des tout-petits.
Mes choix se font ensuite au “coup de cœur”. Je sélectionne tout d’abord toutes les pièces qui répondent exactement au cahier des charges puis avec Jean-François Basteau (mon ami pianiste et partenaire sur tous les recueils) nous les jouons et je fais ensuite la sélection.
 
- Quels sont les compositeurs actuels que vous sollicitez le plus ?
J’ai quelques amis compositeurs que je propose à Christophe Félix, Directeur des Éditions Robert Martin, comme Jean-François Basteau, Alain Celo, Gilles Farinone et d’autres, mais en général c’est Christophe Félix qui se charge de la relation avec les compositeurs. Ensuite, tous ne répondent pas forcément; comme je vous le disais, écrire en respectant un cahier des charges est parfois contraignant. Mais en général, ils sont plutôt heureux d’être sollicités et le sont d’autant plus quand leur pièce a été choisie.
 
- Quels sont ceux avec qui vous souhaitez collaborer ?
Je n’ai pas d’exigence particulière. J’aimerais par exemple qu’Etienne Perruchon réécrive pour un petit flûté. Il ne l’a fait qu’une seule fois.
 
- Chaque partition de flûte est accompagnée d’une partie au piano. Un CD de démonstration est fourni. Vous participez à l’enregistrement ?
Quels plaisirs en retirez-vous ?

J’adore ça. C’est un vrai moment de plaisir. Jouer avec un ami comme Jean-François qui vous connait très bien, c’est un avantage. Christophe Félix est aussi un ami, et l’ambiance est toujours fort sympathique, même si enregistrer des œuvres destinées à servir de modèle reste quelque chose de risquée. On positionne les micros très près de façon à faire entendre un son le plus réaliste et le plus “pédagogique” possible, et c’est assez stressant. On doit d’abord plaire aux professeurs et je suis bien placée pour savoir que nous sommes exigeants quand il s’agit de faire acheter ce genre d’ouvrage à nos élèves.
 
- Vous mettez vous à la place de l’élève lors de cet enregistrement ?
Pas uniquement au moment des enregistrements :  tout le temps ! Mais il est vrai qu’au moment des enregistrements, oui, j’essaie d’être au maximum “connectée” aux éventuelles réactions qu’ont les enfants. Par exemple : j’exige que les parties piano soient enregistrées avec le métronome à l’oreille de Jean-François. Je sais que c’est contraignant, mais je suis certaine, pour l’avoir expérimenté trop souvent malheureusement, que si la partie de piano n’est pas rigoureusement en place, l’élève ne pourra pas jouer dessus. Et c’est ce genre d’éléments qui plaisent aux professeurs. On me fait souvent la réflexion : “ on voit bien qu’on a affaire à un professeur qui connait bien les élèves et leurs réactions “.
Étant moi-même enseignante depuis longtemps, je sais comment réagit un élève devant une page comportant beaucoup de textes écrits sur une page de méthode : il ne les lit pas et va droit à la première ligne de notes. Alors, à quoi bon écrire de nombreuses explications ? Ma méthode du Tout Petit Flûté comporte le moins de textes possibles, avec des pages peu chargées, des photos que j’espère être les plus explicites possible, des illustrations etc. .. ; En résumé, c’est cela aussi se mettre à la place de l’élève.
 
- Vous enseignez depuis des années. Avez-vous le sentiment que les jeunes élèves d’aujourd’hui attendent un répertoire et une manière d’enseignée différente ? 
Je ne crois pas que les jeunes élèves ont tant d’exigences que cela. Je pense que ce sont les structures et les politiques culturelles qui influent sur les contenus et les manières d’enseigner. Il est certain que l’apprentissage quel qu’il soit se doit d’être ludique et nos enfants sont partout sollicités de cette manière.
On ne peut certes plus enseigner la musique de manière sévère et stricte car on n’aurait plus d’élèves dans les conservatoires. Mais je pense que c’est la compétence et la passion du professeur qui dirigera l’élève vers ses choix et ses attitudes vis à vis de l’apprentissage. Pour moi l’exigence et la motivation des élèves ne sont pas incompatibles, bien au contraire. A vouloir trop alléger les contenus, les emplois du temps, les contrôles etc. ... on démotive en fin de compte les élèves car on sous-estime leur potentiel et leurs valeurs. Notre enseignement se doit bien sûr d’évoluer avec le mode de vie, c’est évident, mais je crois que nous devons continuer à vouloir tirer vers le haut avec le plus d’exigence possible ceux qui en ont les possibilités et le potentiel, tout en s’adaptant avec “rondeur” aux progressions beaucoup plus lentes des autres qui ont moins de facilité ou sont moins réguliers dans leur travail.
 
- Le Petit Flûté a-t-il pour vous un profil type ? Comment l'imaginez-vous singulier ou multiple ?
Multiple : le profil type du Petit Flûté, c’est qu'il permet de jouer avec un accompagnement, et de maintenir de façon plaisante le contact avec l’instrument, comme pendant les vacances par exemple, quand on n’a pas de cours avec le professeur ; C’est aussi un outil précieux quand il s’agit de jouer pour une fête de famille ou un mariage ou toute autre manifestation publique. Il suffit de se munir d’un bon lecteur cd et la satisfaction des parents ou autre petit public est complète. Troisième profil, c’est  l’utilisation pédagogique qu’en font les professeurs : avoir un accompagnement piano permet à l’élève d’avoir une écoute plus harmonique de la pièce, de s’obliger à respecter le tempo, de l’enchainer quoiqu’il arrive et de retirer de tout cela une belle satisfaction. Tout ceci est pédagogiquement très complet.
 
- Les classes de flûtes traversières des écoles de musique et conservatoires en France attirent toujours autant d’élèves. Comment expliquez-vous ce succès ?
Et bien, la flûte reste un instrument “séduisant” pour les familles car peu cher. Elle jouit peut-être également d’une “bonne “ réputation en terme de difficulté d’apprentissage; Les parents, qui choisissent parfois l’instrument pour leur enfant ou tout du moins les orientent dans leur choix, pensent souvent, et on ne peut pas les blâmer, que le “ violon est très difficile” , que le tuba “ est trop exigeant en terme de souffle”, etc, etc . La flûte apparaît donc comme un instrument facile.
Et j’ajouterai que les classes de flûtes sont souvent dynamiques et bien représentées dans les projets, les concerts, les auditions des écoles de musique et ce, pour différentes raisons :-  le répertoire qui est très vaste et très riche, et aussi le fait que la flûte est facilement “transportable”. Tous ces éléments contribuent sans aucun doute au succès constant des classes de flûte;
 
- Quelle recette faut-il conserver pour que cette dynamique de classe ne faiblisse pas ?
Je pense qu’il faut s’adapter aux nouveaux modes de vie des familles, toujours être attractif dans le contenu de nos cours et dans nos projets. Mais cela n’est pas toujours chose facile. Notre pédagogie doit évoluer, nous devons essayer d’être tout de même exigeant en terme d’objectifs et de résultats comme je le disais précédemment, tout en restant dans le domaine du “ludique, distrayant, et pas trop prenant”. Les parents parlent beaucoup de notion de plaisir et oublient trop souvent que pour se faire plaisir, il faut avoir un assez bon niveau technique et que, donc, il faut travailler. Alors, pour conserver cette dynamique de classe, il faut sans cesse remettre notre pédagogie en question.
 
- Les pratiques d’orchestre dès le premier cycle se multiplient dans les écoles de musique et conservatoires. Dans ces ensembles musicaux pour la plupart conforme à la nomenclature d’orchestres d’harmonies, les pupitres de jeunes flutistes « débordent ». Pour les jeunes débutants, privilégiez- vous les ensembles de flûtes ou petit ensembles mixtes à la participation à l’orchestre d’harmonie ?
Oui, je forme tous les ans des ensembles de flûtes (quatuors et grands ensembles) et nous produisons des spectacles en fin d’année, comme la Flûte en Chantier et la Flûte Enfantée de Claude Henry Joubert, et d’autres comme par exemple l’année dernière sur le thème du cinéma. Cette année, tous les élèves flutistes se produiront sur une pièce de Will Offermanns, où ils danseront en jouant de la flûte. Mais bien sûr, je les encourage à faire de l’orchestre, car c’est pour moi très important dans l’apprentissage et très bénéfique en terme de déchiffrage.
 
- Quels sont vos projets pour les prochains recueils de La collection du Petit Flûté ?
Un “nouveau Petit Flûté” sortira bientôt, qui devrait être une alternative au Volume 1 (même progression, même cahier des charges) destiné aux élèves de premier cycle et puis, nous réfléchissons sur d’autres projets, mais là, je ne peux encore rien dire.
 
- Quels sont vos projets artistiques et pédagogiques ?
Je prépare actuellement quelques concerts en solistes, et d’autres avec mon trio Flûte, harpe et comédien. J’ai également plusieurs master-class Petit Flûté de programmées dans l’année. Ce sont des professeurs de Conservatoire qui m’invitent à venir faire travailler les jeunes élèves. J’adore ça. Ces master-class sont l’occasion pour les enfants de jouer en public des extraits des recueils, devant moi, et je fais un petit cours à chacun. Je suis allée récemment au Conservatoire d’Angers où les professeurs de flûte, piano, chant et les classes à horaires aménagés avaient créé tout un spectacle autour de mes recueils en inventant un scénario. C’était formidable. Et le lendemain, je suis intervenue en master-class pour tous ces jeunes flûtistes que j’avais entendu la veille.
Evidemment, l’ambiance de ces master-class est toujours très gaie, chaque élève repart avec beaucoup d’encouragements mais également avec quelques conseils sur leur son, posture ou interprétation, ou les 3 !, et les parents sont ravis. C’est un peu l’école des fans des Petits Flûtés, mais quel bonheur chaque fois. Et c’est également l’occasion pour nous les enseignants, de nous retrouver. Je rencontre de nouveaux collègues, de nouvelles façons de travailler, nous échangeons beaucoup et c’est chaque fois très constructif.
Je peux dire pour conclure que je fais vraiment un métier que j’aime et c’est cette passion que j’essaie de transmettre.
Merci
Y.R.